Friends : les secrets de son succès

Il y a 19 ans, le 6 mai 2004, était diffusé le dernier épisode de la mythique série Friends, intitulé « The Last One ». Considérée comme l’une – si ce n’est pas la – plus grande sitcom jamais créée, nous sommes en droit de nous demander 19 ans plus tard : pourquoi ? Qu’est-ce que Friends a fait en plus que les autres séries de l’époque ? Retour sur le phénomène.

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Friends, c’est 10 saisons, 236 épisodes, plus de 250 nominations à des cérémonies de récompenses diverses et variées, entre 20 et 30 millions de téléspectateur·rice·s à chaque saison jusqu’à sa dernière et un ultime épisode diffusé le 6 mai 2004 regardé par plus de 52 millions d’américain·e·s lors de sa diffusion sur la chaîne NBC, un record absolu dans les années 2000 pour la télévision. Mais comment expliquer le succès de la série ? Aujourd’hui décriée par la nouvelle génération qui l’accuse d’être cringe (qui a mal vieilli, ndlr) ou d’avoir des blagues qui ne passeraient absolument pas dans notre société d’aujourd’hui (grossophobie, homophobie, transphobie.. la liste s’avère longue), il faut tout de même replacer le show dans son époque. La première saison fut diffusée au début des années 90, à une époque où l’humour et les thèmes abordés à la télévision étaient bien différents (pas excusables, qu’on s’entende, mais malheureusement commun) ; une époque où l’inclusivité n’était clairement pas au rendez-vous non plus. Si on arrive à remettre le show dans son époque, on ne peut nier l’impact important que ce dernier a eu sur le monde des séries et des sitcoms en particulier.

Une sitcom pas comme les autres

On vous l’accorde : quand on y pense sans vraiment pousser la réflexion trop loin, Friends ressemble à n’importe quelle sitcom que l’on a pu voir à la télévision entre les années 80 et la fin des années 2000. La série est tournée devant un public avec des rires enregistrés, elle est de type comédie et ses épisodes durent une vingtaine de minutes. Elle a clairement les standards d’une sitcom des plus banales et pourtant..

Pourtant, ça n’est pas forcément le cas. Quand la première saison de Friends a été diffusée sur NBC, le pitch était plutôt original pour l’époque. Alors que les sitcoms des années 80 se concentraient principalement sur la vie de famille (Madame est Servie, Mariés, deux enfants, Cosby Show, La Fête à la Maison…), Friends présente ce groupe d’ami·e·s au milieu de leur vingtaine qui n’ont pas encore de famille à eux·elles car leur famille, c’est celle qu’iels ont choisi : leurs ami·e·s. Un thème rafraîchissant qui parle à une large partie de la population : les parents qui se rappellent de cette époque avant qu’iels aient fondé une famille, les jeunes adultes qui sont en plein dans leur vingtaine et les adolescent·e·s, qui rêvent d’avoir un groupe d’ami·e·s comme celui présenté à la télé toutes les semaines. Contrairement aux séries de l’époque qui mettaient en scène des familles modestes ou aisées, on nous présente des personnages qui se cherchent dans leurs carrières et qui, pour certain·e·s, sont même fauchés – bien loin de la famille parfaite américaine dépeinte la décennie précédente.

Bien qu’elle s’en moque parfois de manière très peu correcte, la série présente également des thèmes pas souvent abordés dans les sitcoms de l’époque, dont le but était uniquement de faire rire les téléspectateur·rice·s en les transportant dans cette bulle parfaite composée de leurs personnages préférés. Ainsi, on présente dès le deuxième épisode l’idée d’un couple lesbien assumé avec l’ex-femme de Ross (David Schwimmer), Carol (Jane Sibbett) avec qui il s’apprête d’avoir un enfant qu’elle va élever avec sa compagne, Susan (Jessica Hecht) – un modèle familial qui n’était pas forcément vu d’un bon oeil à l’époque et qui était encore moins représenté à la télévision.

Des thèmes beaucoup plus graves sont également évoqués tout le long des dix saisons, comme le suicide de la mère de Phoebe (Lisa Kudrow) alors qu’elle n’était qu’adolescente et le fait que cette dernière se soit retrouvée dans la rue pendant quelque temps. Encore quelque chose qui n’était pas forcément récurent dans ce format de série de l’époque, puisque la sitcom devait avant tout faire rire.

Le format des épisodes et des storylines était également une nouveauté pour les sitcoms : habituellement construites de manière à ce qu’une histoire débute un épisode et se termine à la fin de celui-ci, permettant aux téléspectateur·rice·s de pouvoir le regarder s’iel n’a pas vu l’épisode d’avant, ce n’est pas forcément le cas de Friends. Certes, tous les épisodes peuvent plus ou moins se regarder de manière individuelle, mais les histoires et intrigues sont bien souvent étalées sur plusieurs épisodes ; on pense par exemple à l’échange d’appartements entre Monica (Courtney Cox) et Rachel (Jennifer Aniston) avec Chandler (Matthew Perry) et Joey (Matt Leblanc) ou encore les épisodes spéciaux à Las Vegas ou à Londres.

Dès sa première saison, tous ces détails ont su démarquer Friends des sitcoms de l’époque… mais pas que.

Que serait Friends sans ses personnages ?

S’il y a bien quelque chose qui marche dans Friends, c’est ses personnages. Bien entendu, la storyline de l’outsider qui intègre un nouveau groupe d’ami·e·s est classique, mais terriblement efficace. L’excuse parfaite pour nous présenter les personnages de manière naturelle, puisque Rachel ne connait réellement que Monica avec qui elle était proche au lycée et à l’université (Ross et Chandler étant clairement relayés au niveau de connaissances). Dès les premiers épisodes, les personnages se démarquent et il est facile de les distinguer et de les comprendre : Chandler est le petit rigolo, Ross l’anxieux, Phoebe la « bizarre », Joey le dragueur; Monica la maniaque et Rachel la petite fille pourrie gâtée. 

Mais ce qui marche avant tout, dans Friends, c’est l’alchimie entre les personnages car il n’y a pas à dire : dès le début de la série, on y croit en cette bande d’ami·e·s ! L’évolution de chacun des personnages est également assez intéressante à analyser tout le long de la série : 

  • Joey

Malheureusement, nous commençons par Joey car il n’y a pas grand-chose à dire sur ce personnage qui a été, à notre avis, le plus maltraité par les scénaristes le long des dix saisons en terme de développement de personnage. Joey est d’abord présenté comme un acteur un peu raté (dès les premiers épisodes les personnages font référence aux projets un peu bancals de Joey dans sa carrière d’acteur) coureur de jupon qui adore manger. Si cette base n’était pas mauvaise, le personnage n’évolue pas pendant le show; au contraire, il régresse d’un point de vue comportemental. Si Joey essaie d’avoir des relations stables avec certaines femmes, montrant une évolution de sa mentalité dans sa perception de voir les femmes, il n’en est pas de même pour son comportement en général. Au fur et à mesure que la série avance et alors qu’il prend de l’âge, Joey agit de plus en plus comme un enfant; une source de comédie dans beaucoup de situations mais qui n’aide pas tellement le personnage à grandir et à évoluer. 

  • Phoebe

Pas toujours mieux servie que Joey en terme d’évolution de personnage, sa progression est quand même plus notable que celle de Joey qui lui, semble régresser au fil des saisons. Comme énoncé un peu plus haut, Phoebe est un personnage très interessant de base ; elle parle du suicide de sa mère dès le premier épisode et on comprend très vite qu’elle a eu une adolescence très difficile : pourtant, quand on regarde Friends, elle n’est pas à plaindre : elle n’énonce jamais avoir de gros problème d’argent, possède un appartement qui était avant à sa grand-mère et on peut sans aucun doute dire qu’elle a réussi dans la vie. Une belle preuve d’espoir et qui montre qu’on a toujours une chance de s’en sortir, peu importe d’où on vient. Si le fait qu’elle ne change pas jusqu’à la dixième saison pour entrer « dans le moule » est assez discutable, elle reste quand même la même tout le long de la série sans jamais s’excuser d’être qui elle est, même si elle est très clairement dépeinte comme la femme « bizarre ».

  • Rachel

Rachel est probablement celle qui a le plus grandi tout le long de la série. Présentée comme une jeune femme pourrie gâtée qui n’avait jamais travaillée de sa vie, elle commence un job de serveuse au Central Perk pour trouver sa voie, professionnellement parlant. Elle devient indépendante, assez indépendante pour décider de rompre avec Ross lorsque ce dernier la trompe (ou pas, iels étaient en break, non ?) et devient beaucoup trop possessif et jaloux. Elle commence comme serveuse, pour terminer dans un poste assez haut placé chez Ralph Lauren, où elle s’épanouie et évolue car elle a trouvé ce qui la passionnait et elle n’a pas hésité à travailler dur pour en arriver là. A la fin de la saison dix, elle est loin la Rachel du premier épisode !

  • Ross

Ross est un personnage controversé dans Friends. Il possède de traits de caractère qui ne font pas toujours l’unanimité, surtout depuis quelques années alors que les nouvelles générations découvrent la série. Jaloux, colérique et prétentieux, il faut cependant réussir à regarder toutes les couches de ce personnage qui est bien plus complexe qu’on peut le penser. Mais certes, il fait souvent pleurnicheur quand il s’agit de ses relations avec les femmes, il enchaine les boulettes comme lorsqu’il décide de mentir à Rachel en lui disant qu’il a bien fait annuler leur mariage à Las Vegas. Friends a tout de même profité de ce personnage pour évoquer certains sujets sensibles, comme le burn out quand Ross doit prendre un congé sabbatique de son travail à cause de ses crises de colère après sa séparation avec Emily.

  • Chandler & Monica

Nous mettons Chandler et Monica ensemble car nous pensons vraiment que ces deux personnages ont grandi ensemble pendant les dix saisons de Friends. La relation de Chandler et Monica a été un vrai renouveau dans la série à la fin de la quatrième saison et toute la storyline autour de leur couple dans la cinquième saison fait, pour nous, de cette saison une des plus iconiques de toute la série.Elle a donné lieu à beaucoup de scènes cultes du show, comme lorsque Phoebe découvre leur relation à travers de la fenêtre de Ross ou encore le superbe épisode de « Ils ne savent pas qu’on sait qu’ils savent ». Le fait que la série se clôture avec leur déménagement en banlieue, quittant l’appartement iconique de Monica avec leurs jumeaux montre bien l’importance qu’a eu ce couple dans le show.

Nous pourrions encore passer beaucoup de temps à analyser Friends, mais il est clair que cette série est culte et ne démérite pas le succès qu’elle a bien pu avoir.

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