Ce Dimanche 02 Octobre débutait la série évènement de cette rentrée 2016, Westworld, le western de science-fiction réalisé par Jonathan Nolan, scénariste et créateur de la série Person of Interest (et accessoirement frère de Christopher, faut-il le préciser, réalisateur, entre autres, de la trilogie Batman The Dark Knight, Inception ou encore Interstellar, dont il a participé à la quasi totalité des scénarios) et Lisa Joy, scénariste pour le séries Pushing Daisies et Burn Notice et qui n’est autre que la femme de Jonathan. Une affaire de famille chez les Nolan.
Westworld est également un enjeu considérable pour la chaîne HBO qui mise très gros sur cet énorme projet télévisuel, censé prendre la suite de Game of Thrones dont la fin est d’ores et déjà programmée pour l’année 2018 (et oui toutes les bonnes choses ont une fin !). Après l’échec au bout d’une saison de la pourtant excellente Vinyl, créée et produite par des monstres comme Martin Scorsese et Mick Jagger, HBO ne peut se permettre un nouvel affront et se doit de trouver un nouveau programme capable de porter le leadership incontesté de la chaîne.
Et c’est pour l’instant une réussite car la chaîne a, avec ce pilote, réalisé son meilleur démarrage depuis 3 ans, réunissant près de 3,3 millions de téléspectateurs.
Westworld est l’adaptation du film éponyme de Michael Chrichton (à qui l’on doit aussi Jurassic Park, entre autres) sorti en 1973 et lui même adapté du livre du même nom. Il s’agit d’une histoire d’anticipation, parfaitement dans l’ère du temps et qui s’inscrit dans la continuité des oeuvres sur la même thématiques, à savoir le rapport des humains aux nouvelles technologies/robots. On peut par exemple citer les ambitieuses séries Real Humans et Black Mirror, ou encore le sublime Her de Spike Jonze dans lequel Joaquin Phoenix s’éprend de son OS.
L’histoire se déroule donc à Westworld, ambitieux parc d’attraction dans lequel les visiteurs sont invités à revivre l’incroyable épopée de la conquête de l’Ouest. Ainsi, des robots humanoïdes plus vrais que nature ont été créés afin de créer une illusion parfaite et faire vivre le grand frisson à des spectateurs avides de grand spectacle. Seulement tout ne se déroule pas comme prévu et le comportement des robots acteurs commence à inquiéter les dirigeants du parc, qui ne peuvent se permettre aucune bévue étant donnés les enjeux colossaux occasionnés par l’ouverture de leur attraction.
On peut d’ailleurs faire un parallèle avec ce projet sur le long terme (cette première saison est bâtie sur un modèle censé être développé sur plusieurs saisons) et les dirigeants d’HBO, dont le tournage a débuté il y a déjà plusieurs années. Alors qu’en est-il ? Westworld est-elle à la hauteur des espérances ?
Tout d’abord, il est impossible d’évoquer cet ovni télévisuel sans parler de son casting 5 étoiles impressionnant. A commencer par le grand, mais trop rare au cinéma dernièrement, Anthony Hopkins, oscarisé en 1992 pour Le Silence des Agneaux, qui fait ici sa première incursion télévisuelle, et incarne avec brio le diabolique docteur Robert Ford, créateur de Westworld, personnage froid et inquiétant. Evan Rachel Wood, l’atout féminin principal de la série, est également parfaite mais n’en est pas à sa première série puisqu’elle a notamment fait des apparitions remarquées et remarquables dans les séries Mildred Pierce et True Blood, toutes deux des productions HBO également. Ed Harris, dont le charisme est incontestable, reprend quant à lui le rôle de Yul Brynner dans le film, en tant que cow-boy robot, ici baptisé « L’Homme en Noir » et qui apparaît lui aussi très mystérieux. Mais le casting se complète également avec James Marsden, dont le personnage manque pour l’instant de consistance, de Jeffrey Wright, qui a déjà fait ses marques dans plusieurs séries, ou encore de Sidse Babett Knudsen, merveilleuse Birgit Nyborg dans la série danoise Borgen, tous deux très convaincants.
Ce qui frappe ensuite à la vision de ce pilote, c’est la réalisation somptueuse de l’épisode, et les moyens colossaux qui ont probablement été mis en oeuvre. La frontière entre série et cinéma, de plus en plus inexistante, disparaît complètement et Westworld s’affranchit des codes télévisuels pour proposer un rendu des plus impressionnants et de très haute gamme. A la bande originale, on retrouve d’ailleurs l’oeuvre de Rawin Djawadi, déjà chargé d’assurer la musique sur Game Of Thrones. La scène de fusillade sur sa revisite instrumentale du tube « Paint it Black » des Rolling Stones dans ce pilote est d’ores et déjà culte et en fera frissonner plus d’un(e).
L’enjeu est assez simple et presque trop manichéen pour l’instant : nous montrer que les robots humanoïdes sont probablement plus humains et dotés de sentiments plus profonds que les dirigeants du parc qui les ont créés. De ce point de vue là, rien de bien novateur ; si ce n’est qu’il faut bien se rappeler du fait que l’histoire a été inventée bien avant tout ce que l’on peut voit dernièrement, et qu’elle est en ce sens très en avance sur son temps !
La narration se compose en trois actes : les créateurs, les robots, et les visiteurs. La série tend ainsi à nous proposer trois points de vue, même si pour l’instant, c’est évidemment celui des robots qui prédomine et sur lequel on veut nous faire le plus réfléchir. Ces derniers sont créées pour obéir à leurs créateurs et pour se contenter de les servir. Seulement, ce pilote démontre justement que les robots humanoïdes sont dotés de sentiments et de capacités de réflexion surprenantes, et l’on peut se douter que la rébellion gronde.
Nul doute que l’oeuvre originale de Michael Chrichton est éminemment très riche et que tous les enjeux ne peuvent être posés en un épisode d’1h10. Mais ce pilote apporte les éléments nécessaires pour convaincre les (nombreux) téléspectateurs curieux de continuer. Il s’agit probablement là de la série la plus ambitieuse vue sur le petit écran depuis bien longtemps ; le risque ne serait-il pas justement que la série plie sous le poids de ses immenses ambitions ? Devant la maîtrise affichée par cet impressionnant pilote, on accorde personnellement, et plutôt deux fois qu’une, le bénéfice du doute à Westworld, qui a le potentiel pour devenir une des plus grandes séries de ces prochaines années. Beaucoup de questions, peu de réponses, mais surtout beaucoup d’enthousiasme et d’impatience à la vision de ce pilote. Vite, la suite !
4/5