AJ & The Queen : l’avis de la rédac’ sur la saison 1 !

Diffusée le 10 janvier dernier sur Netflix, la première saison d’AJ & The Queen, créée, écrite et produite par Rupaul Charles (Rupaul Drag Race, Grace et Frankie) et Michel Patrick King (Sex and the City, 2 Broke Girls) nous fait suivre la vie en tournée de Ruby Red/Robert, une drag queen en fin de carrière dont la vie va être bouleversée à de multiples niveaux notamment suite à sa rencontre avec AJ, enfant solitaire dont la mère ne peut s’occuper. Qu’a pensé la rédaction de ces 10 épisodes hauts en couleur ?

  • Le monde du drag

Qu’on se le dise, malgré la démocratisation de l’art du drag, avec notamment la diffusion de l’émisision Rupaul Drag Race sur Netflix, les drag queen restent des artistes relativement peu connues et/ou reconnues. Beaucoup y voit des hommes voulant se travestir en femme de manière malsaine et obscène. La série déconstruit ces clichés de manière intelligente et naturelle. Non, un homme performant en tant que drag queen ne souhaite pas nécessairement changer de sexe, il crée un personnage qui lui permet de divertir le public et souvent de grandir en tant qu’homme. 

La série se veut donc instructive pour ceux qui découvrent mais récompense aussi les connaisseurs avec un nombre de références et de clins d’oeil bien trop important pour être listés. On notera tout de même la présence de nombreuses queen connues des amateurs de Rupaul Drag Race (Latrice Royale, Trinity The Tuck, Bianca del Rio, Chad Michaels et 22 autres dont vous trouverez la liste ici, des allusions aux grandes icônes gay (Cher, Diana Ross, Céline Dion, Oprah…) mais également aux méthodes de transformation en drag queen (tuck, padding, faux seins) le tout enrobé d’humour et de tendresse.

Pour finir, on nous fait passer de l’autre côté du rideau où l’on voit que la vie de drag queen n’est pas que paillettes et perruques. Ce métier est difficile, ingrat, éprouvant et rarement gratifiant financièrement. 

  • Des thèmes importants

Outre l’immersion dans le monde du drag, la série évoque également de nombreuses problématiques liées à la communauté lgbtq mais pas que. La notion de respect de l’autre malgré ses différences est évidemment présente tout le long de la saison mais la série aborde également le traitement du handicap avec le personnage de Louis, le meilleur ami de Robert qui est noir, gay, ancienne drag queen et aveugle. Les relations amicales, amoureuses, familiales sont variées, pertinentes et interprétées avec justesse.

Outre le racisme, l’homophobie et la toxicomanie, sont également évoquées les notions de genre et du besoin de mettre une étiquette sur les gens. Le féminisme n’est pas en reste et lorsque c’est un homme transformé en une magnifique drag queen qui donne les leçons, on écoute. Sabrina Duncan (ancienne Drôles de Dames) fait un caméo dans le rôle d’une femme de garagiste dans une ville qui organise des concours de t shirt mouillés et qui aurait cru que ce serait la parfaite opportunité pour parler du cancer du sein ? Nous non plus et pourtant cela fonctionne. 

La vraie réussite de la série est d’aborder tous ces sujets avec sérieux et légèreté selon la situation. La relation de Robert avec le personnage d’AJ est également propice aux questionnements et aux échanges intergénérationnels. 

  • Un casting étonnant

AJ & The Queen, c’est aussi un casting inattendu pour donner vie à des personnages incroyables. Ainsi, on retrouve Josh Segarra (Arrow) dans le rôle du petit ami -pas si gentil- de Robert. Josh livre une prestation à des kilomètres de ses précédents personnages. IZ G l’interprète d’AJ est incroyable et tient tête à Rupaul avec brio. C’est l’occasion de noter que la série est l’opportunité de voir Rupaul performer en drag queen (cela n’arrive plus depuis des années), toutes les chansons utilisées dans la série sont les siennes. Concernant les autres drag queen présentes, on relève les performances de Latrice Royale en tenancière de club, Fabergé Legs et Ginger Minj dans la peau de Tommy l’organisateur de fêtes d’une amie d’enfance de Robert. C’est la géniale Jane Krakowski (Ally McBeal, The Unbreakable Kimmy Schmidt) qui a été choisie pour ce rôle. Tia Carrere (Wayne’s World, Sydney l’aventurière) quant à elle interprète Lady Danger, une arnaqueuse borgne proche de la communauté drag et Lauren Braco (Les Sopranos) fait une apparition pour jouer son propre rôle.

On retrouve donc des acteurs et actrices de différentes univers, il y a beaucoup de têtes connues et leurs apparitions sont toutes savoureuses.

  • Un style kitsch assumé

La tournée de Ruby nous permet de faire le tour des Etats-Unis et au travers des épisodes on apprends l’importance de ne pas critiquer Oprah, de manger des pancakes et de donner de bons pourboires aux serveuses. La série a beau être faite par Netflix on se demande parfois si c’est vraiment le cas tant certaines scènes peuvent laisser transparaitre un manque de budget. Pour les amateurs de Rupaul Drag Race, on reconnait les petits défis de comédie de la compétition, en mode telenovela cheap (pas cher en français, ndlr) et on comprends donc que c’est voulu. Mais pour le téléspectateur non averti l’ensemble peut sembler vraiment kitsch. Des couleurs criardes, un jeu exagéré, une réalisation simpliste, c’est le style parfaitement assumé de AJ & The Queen. On peut même dire que cela fait partie de son charme et la démarque des séries actuelles. Il y a dans ce show une vraie volonté de rester fidèle à lui-même. Il semble dire au public « aime moi comme je suis, c’est à prendre ou à laisser ».

De la déconstruction du modèle hétérosexuel prétendument parfait, à la révélation que « les gens ne sont pas qu’une seule chose », ce voyage initiatique sous couvert de road trip à travers l’Amérique profonde nous sert les tribulations d’un.e enfant désabusé.e et d’une drag queen usée. Une magnifique histoire d’amour entre deux personnes qui, malgré leur différence d’âge, de sexualité, de vie, de couleur de peau, de genre, réalisent qu’ils/elles ont peut-être plus de points communs et de choses à s’apporter qu’ils/elles n’auraient pu le soupçonner.
En bref, AJ & The Queen peut être appréciée de tous si on se donne un peu la peine de s’ouvrir à l’inconnu. 4/5

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