Ne pouvant éviter la comparaison avec 24 heures chrono, la série 24: Legacy s’est terminée ce lundi 17 avril sur la FOX par un season finale relativement sobre. « Legacy » signifiant « héritage » en français, la série est-elle vraiment la digne héritière de sa grande sœur ?
- Un héros hanté par son prédécesseur
Malheureusement pour lui, le héros du show, Corey Hawkins, est le premier à souffrir de la comparaison avec 24 heures chrono, et surtout avec son acteur emblématique, Kiefer Sutherland. Jack Bauer est devenu un personnage tellement culte qu’il semble difficile voire impossible de le remplacer et pis encore, de réussir à le faire oublier des téléspectateurs. C’est pourtant la lourde tâche qui incombe à Corey Hawkins, jeune acteur talentueux repéré dans Straight Outta Compton ou The Walking Dead, et qui prête ses traits à Eric Carter. Alors oui, certes, Eric Carter n’est pas Jack Bauer (bien qu’il porte le sac en bandoulière de la même façon, qu’il court partout et qu’il soit toujours pendu au téléphone comme Jack), toutefois il serait cruel de dire que le personnage ne convainc pas.
En effet, Carter est badass, audacieux, intelligent, loyal et prêt à tout pour protéger son pays et les siens. Un véritable petit patriote, comme les américains les aiment, mais un personnage qui séduit. Seulement voilà, à la différence de Jack, il a grandi dans la rue avec la violence des gangs de dealers d’armes et de drogue. Un personnage au style complétement différent donc. Efficace et charismatique, Corey Hawkins relève le challenge.
- Le trop est l’ennemi du bien
Trop de personnages, trop de sous-intrigues, … on se perd quelque peu dans cette nouvelle mouture de 24. Jugez plutôt : Rebecca Ingram (Miranda Otto), future ex-directrice de la CTU, gère la crise aux côtés du directeur actuel de la CTU, Keith Mullins (Teddy Sears), et des opérateurs Andy (Dan Bucatinsky) et Mariana (Coral Peña). MAIS elle gère également une crise familiale (liée aux attaques des terroristes) avec son mari, le sénateur des USA candidat aux élections présidentielles, John Donovan (Jimmy Smits) et le père de celui-ci, Henry Donovan (Gerald McRaney).
En parallèle, Nicole Carter (Anna Diop), l’épouse du personnage principal, se voit confiée par son mari à son ex-compagnon, Isaac Carter (Ashley Thomas), le frère gangster du héros. Vous suivez toujours ? Sans oublier Ben Grimes (Charlie Hofheimer), le vétéran paranoïaque par qui tout arrive dans les premiers épisodes et bien évidemment, les méchants, Jadalla Bin-Khalid (Raphael Acloque) et ses hommes, puis Asim Naseri (Oded Fehr).
Fort heureusement, les storylines secondaires s’estompent au fur et à mesure que la saison avance. Ainsi, l’histoire mélodramatique d’Amira (Kathryn Prescott), son frère (Themo Melikidze), son père (Ivo Nandi), son ex (Zayne Emory) et son prof (Kevin Christy) prend fin à l’épisode 6. Au même moment, la dynamique change également du côté d’Isaac et de Nicole. La seconde partie de la saison se renouvelle donc mais apporte toujours son lot d’intrigues en tout genre.
- Une série dans l’air du temps
En effet, les problèmes de société actuels sont utilisés pour faire avancer l’intrigue. Ainsi, dans l’épisode 3, Carter se sert du Black Lives Matter pour mener à bien sa mission. Ayant pour tâche d’infiltrer un commissariat, Rebecca lui demande « Mais comment allez-vous faire ? », ce à quoi il répond « Je suis noir, ça ne devrait pas être très compliqué ». Et effectivement, il lui suffit de mettre sa capuche sur la tête, d’avoir l’air soupçonneux et il se fait arrêter quelques minutes plus tard par des policiers blancs. Toutefois, l’un des policiers acceptera de l’aider dans sa mission. Quant à Nilaa (Sheila Vand), la secrétaire musulmane du sénateur Donovan, elle se retrouve piégée et accusée de terrorisme, situation dénonçant l’amalgame Islam/islamisme. Du côté d’Amira et de son frère, leur père se trouve bien dépourvu face à leur enrôlement djihadiste. Son impuissance face à leur détermination fait écho au désespoir des parents vivant le même cas de figure. Mais d’autres sujets d’actualité sont traités dans le show tels que le patriotisme, l’homosexualité ou le féminisme : Andy, l’opérateur, était en couple avec l’agent Thomas « Tom » Locke (Bailey Chase) et n’a pas hésité à accepter une mission suicide pour le bien de son pays, et Rebecca fait preuve d’un héroïsme sans faille en prenant la place de son mari ou en décidant de torturer son beau-père pour lutter contre la menace terroriste. Rebecca est une femme forte, qui fait des choix difficiles mais nécessaires, à l’inverse de son époux ou du directeur de la CTU.
- Un héritage en demi-teinte
Certains « haters » diront que 24 Legacy est une pâle copie de son prédécesseur, et les autres diront que la série s’éloigne trop de l’originale… C’est pourquoi il serait préférable d’arrêter la comparaison des deux shows et d’essayer de donner sa chance à 24 Legacy en tant que série singulière. Cependant, si l’on reste dans l’optique de comparer les deux séries, alors l’héritage est raté. En effet, bien qu’on prenne plaisir à revoir Tony Almeida (Carlos Bernard), force est de constater que son apparition est complétement inutile et n’est rien d’autre que du fan-service destiné à rappeler aux nostalgiques de 24 heures chrono qu’on est bien dans une suite du show. De plus, on sent que la réalisation a parfois été bâclée, entre faux raccords, négligences ou autres erreurs de montage. Par exemple, on apprend la capture du terroriste avant même de voir la scène, qui a lieu juste après ! Ou les minutes qui passent sont parfois bien longues pour le peu d’action engagé (on pense notamment au marchand d’armes qui déclenche une alarme avec ses hommes n’arrivant que 10 minutes plus tard, une seule porte les séparant…). Autre mauvais point du show : les scènes mélodramatiques qui donnent à la série un air de soap opera : le triangle amoureux des Carter; le discours fraternel au moment de l’échange d’otages (pire timing possible); Amira, son ex et son professeur… Pour finir, les acteurs manquent pour la plupart de charisme et n’apportent pas grand chose à la série : Andy n’a pas le tempérament de feu de Chloé (Mary Lynn Rajskub, 24 heures chrono); Nicole, la seule figure féminine dans l’entourage du héros est ennuyante au possible et nous fait regretter Kim (Elisha Cuthbert), la fille pourtant horripilante de Jack Bauer ; et côté CTU, le pauvre Teddy Sears est complétement effacé par sa partenaire de jeu, Miranda Otto.
Toutefois, si l’on part dans l’optique de traiter 24 Legacy comme une série singulière, alors « l’héritage » est réussi. L’épisode 6 en particulier comporte tous les éléments nécessaires à une bonne série d’action, entre suspense et mauvais timing qui permet davantage de rebondissements. Le rythme est soutenu et chaque épisode est différent du précédent, nous emmenant soit au Pentagone, soit au beau milieu d’une guerre des gangs, soit en mission suicide au quartier général des terroristes. De plus, il faut noter que Kiefer Sutherland est producteur exécutif du show, c’est à dire qu’il a un droit de regard sur le scénario, la réalisation ou encore les acteurs. Il aurait donc pu très bien valider les choix scénaristiques pour la série originale. En bref, la mission de 24 Legacy est réussie puisqu’elle nous donne envie de replonger dans 24 heures chrono. Une CTU en crise, des kidnappings à chaque épisode (ou presque), différentes intrigues qui s’avèrent toutes être liées, un héros qui court partout et qui agit avec efficacité, des sujets de société actuels, autant de bons points qui font de 24 Legacy une série plaisante à regarder devant laquelle on ne s’ennuie pas.
- En conclusion
Points positifs :
– le plaisir de retrouver l’univers de 24 heures chrono
– le personnage de Rebecca Ingram, jouée par Miranda Otto
– un rythme soutenu
Points négatifs :
– les touches de soap opera (le triangle amoureux entre le héros, sa femme et son frère; la lycéenne et son prof)
– des situations parfois prévisibles
– des rebondissements souvent téléphonés
Note : 3,5/5. De l’action, du suspense, 24 Legacy est un bon divertissement qui nous donne envie de replonger dans 24 heures chrono. N’est-ce pas là le but d’un bon « héritage » ?