Broken : l’avis de la rédac sur la série

Broken est une mini-série dramatique en six épisodes qui a commencé sa diffusion sur la BBC One en mai dernier. La série s’est faite assez discrète, elle vaut pourtant largement le détour. Elle nous présente une petite communauté, dans la périphérie d’une grande ville au Nord de l’Angleterre, guidée par le prêtre catholique Père Kerrigan (incarné par Sean Bean). Chaque épisode se focalise sur le problème d’un personnage et les conséquences que cela peut avoir sur son entourage, accompagné par Kerrigan qui doit affronter ses propres démons et son passé.

Broken fait partie de ces séries qui sortent sans que l’on en entende vraiment parler, on tente le coup pour voir ce que ça donne et finalement cela fonctionne tellement bien qu’on ne comprend pas pourquoi la diffusion s’est faite si discrète. La force de la série est bien sûr son scénario signé Jimmy McGovern, mais également sa réalisation et le jeu des acteurs. Chaque épisode nous présente un personnage de la communauté de cette petite ville, qui doit faire face à un événement. On parle ainsi de problèmes d’argent, de deuil, de meurtre, de culpabilité, de suicide, d’homophobie, de racisme, de maladie mentale, mais également de viol, de pédophilie, et bien sûr de religion, qui reste l’élément central à la série grâce au personnage du Père Kerrigan, incarné brillamment par Sean Bean.

Cela fait beaucoup d’élément pour seulement six épisodes, des thèmes lourds et cela aurait pu faire trop, mais le jeu des acteurs incroyablement vrai (nous avons parfois même l’impression d’oublier que Broken n’est qu’une série), mais également grâce à la puissance de l’écriture des scènes qui s’enchaînent avec beaucoup de justesse. Outre Sean Bean, il faut noter le jeu de certains acteurs, dont Muna Otaru (qui incarne Helen Oyenusi), Mark Stanley (qui incarne l’agent de police Andrew Powell), Anna Friel (qui incarne le tout premier personnage que l’on rencontre dans la série, Christina Fitzsimmons), et d’autres encore.
Aucune scène n’est jouée juste pour faire pleurer sur le sort des personnages ou pour aborder un thème parce qu’il faut en parler, la série nous parle de thèmes importants parce qu’ils font partie de la vie de tous les jours de cette possible communauté, et qu’ils pourraient frapper n’importe quelle petite ville d’Angleterre ou de tout autre pays. Chaque épisode nous amène à découvrir un nouveau personnage, à nous attacher à cette communauté et à cette paroisse, jusqu’à la scène finale de la série qui est terriblement touchante. Chaque personnage, que le Père Kerrigan a soutenu pendant les épreuves qu’ils sont venus à affronter au cours des cinq précédents épisodes, est là en retour pour lui.
Kerrigan, qui pensait abandonner sa carrière de prêtre après avoir traversé autant d’épreuves et avoir remis sa foi en question, se voit offrir une sorte de rédemption. Le sixième épisode est d’ailleurs centré sur ce personnage principal, qui tout au long de la saison est assailli de flash-backs. Il a grandi auprès d’une mère peu aimante et très exigeante, a étudié dans une école où il subissait des attouchements de la part des prêtres catholiques qui lui faisait la classe et ces images ne cessent de le hanter quand il atteint le moment le plus important de la messe… Le poussant même à remettre en question certains de ses choix actuels. “I’m not a priest, I’m an imposter,” (Je ne suis pas un prêtre, je suis un imposteur) dit-il dans le dernier épisode, mais en tant que spectateur et après l’avoir vu agir dans les cinq autres épisodes, nous savons qu’il excelle à aider les autres et que sa paroisse ne pourrait pas rêver meilleur prêtre.
Broken est une parenthèse dans la vie de ces personnages, qui sont comme vous, comme nous, des hommes, des femmes, des enfants, qui souffrent, qui vivent, qui traversent des épreuves. Et nous en devenons les spectateurs.

Broken est cependant une série où il n’y a pas beaucoup d’action. Ne vous attendez pas à des rebondissements à chaque scène. Comme beaucoup de séries anglaises, c’est la psychologie des personnages qui prime ici. Si vous êtes prêts à vous lancer dans une analyse des problèmes sociétaux actuels et à vous attacher à une petite communauté le temps de six épisodes, alors la série est pour vous. C’est ce qui fait la force de la série, les personnages cherchent à lutter contre leur conscience, contre les événements qui semblent s’acharner sur leur ville. Il faut dire que le sort semble vraiment avoir décider de s’en prendre à eux. La réalisation et le scénario de Jimmy McGovern fait tout pour mettre en valeur les personnages, et le tout donne un rendu très touchant, sensible et réaliste.

La série a été comparée à The Handmaid’s Tale, dont on parle beaucoup en ce moment et dont vous pouvez retrouver notre bilan juste ici. Alors que The Handmaid’s Tale, adaptée du roman de Margaret Atwood, vous fera avoir peur du fanatisme religieux et des proportions qu’un tel comportement peut avoir, Broken a en effet décidé de montrer à la fois le bon et le mauvais de la religion. Alors que certains personnages se raccrochent à leur foi pour tenter de sortir la tête de l’eau, d’autres décident de refuser l’aide de Kerrigan. C’est par exemple le cas avec l’épisode qui parle de l’homosexualité : le personnage de Carl (incarné par Ned Dehenny) explique qu’il a grandi dans une famille catholique, qu’il était très croyant et qu’il aimait la religion. Mais qu’en étant homosexuel, il était persuadé de trahir son Dieu et sa foi, qu’il faisait quelque chose de mal. Sa culpabilité n’a cessé de le ronger toute sa vie. Il explique ainsi à Kerrigan que sans le christianisme et sans l’éducation religieuse qu’il a reçu, il n’aurait pas souffert autant et aurait pu vivre une vie « normale ». C’est aussi le cas avec les attouchements sexuels qu’a subi Kerrigan quand il était enfant, ce sont des affaires bien cachées que l’on entend très souvent aux informations, des prêtres accusées d’actes de pédophilie sur de jeunes enfants… Les scénaristes ont tenu à explorer tous les aspects du christianisme, même les plus sombres. Mais d’un autre côté, grâce au personnage de Kerrigan, nous avons droit au bon côté du christianisme, grâce à un personnage profondément altruiste, posé et réfléchi, qui n’agit jamais dans son intérêt. La scène de la messe, où il condamne les bureaux de paris de s’installer dans une ville aussi pauvre que la leur, guidant finalement à la scène suivante où les habitants vont détruire les machines de jeux à coup de battes de Baseball, est incroyablement forte et puissante.
Broken prend une direction opposée à celle prise par The Handmaid’s Tale, qui nous donne une vision cruelle d’une société guidée par des extrémistes religieux. Broken est un véritable chef d’oeuvre et nous vous recommandons vivement d’y consacrer un peu de votre temps.

Conclusion, une excellente mini-série, un niveau impressionnant et une réalisation incroyable. Six épisodes majestueux, on est juste déçus que ce soit si court ! Notre note : 5/5

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