De l’encre à l’écran – The Pale Horse (Le Cheval Pâle)

On ne compte plus le nombre de romans d’Agatha Christie adaptés pour la télévision ! The Pale Horse (Le Cheval Pâle en VF) ne déroge pas à la règle et s’offre une mini-série de deux épisodes de 60 minutes réalisée par Leonora Lonsdale diffusée ce jeudi 30 avril dès 21h sur Canal +. Cependant, cette adaptation de l’encre à l’écran est-elle fidèle à l’oeuvre originelle ? Voici la réponse.

  • Un Agatha Christie qui sort des sentiers battus
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En effet, dès les premières pages, nous comprenons rapidement que la célèbre romancière sort de sa zone de confort en offrant une intrigue aux accents ésotériques sur fond de meurtres. Un choix hors du commun qui peut dérouter les initiés. De plus, à l’exception de l’écrivaine Ariadne Oliver, The Pale Horse ne met pas en scène de personnages récurrents d’Agatha Christie tels que Hercule Poirot ou Miss Marple. Non, cette fois le héros est un inconnu, Mark Easterbrook (joué par Rufus Sewell à l’écran), historien et romancier à ses heures perdues. Bien évidemment, le fil rouge reste tout de même policier : une série de meurtres inexpliquée ainsi qu’une mystérieuse liste de noms. Cependant, l’allusion à la sorcellerie et à la magie noire arrive rapidement dans le récit. Ainsi, le livre ne dégage pas la même atmosphère que les autres polars d’Agatha Christie, fait perturbant mais toutefois intéressant puisque l’on se dit que le dénouement sera forcément rationnel connaissant l’auteure et nous cherchons alors une explication logique… mais le sera-t-il vraiment ?

  • Des différences majeures

Disons le clairement : l’adaptation télévisuelle a pris beaucoup de libertés avec le roman et n’a plus grand chose à voir avec celui-ci. Tout d’abord, de par la personnalité du héros, point que nous aborderons juste après. De plus, la construction de l’intrigue diffère totalement également, et certains personnages ont tout simplement été effacés de l’oeuvre originale, à l’instar de Ginger, du légiste Jim Corrigan, de l’écrivaine Ariadne Oliver ou du pasteur par qui tout arrive, la liste de noms étant trouvée sur lui. Bien que l’identité du tueur reste la même, la mise en place du dénouement et l’explication finale n’ont plus rien à voir. Pourtant, dans le roman, plusieurs signes annoncent le dénouement : [SPOILERS] l’écrivaine Ariadne Oliver lorsqu’elle explique les meurtres de ses romans, Miss Grey qui évoque les philtres d’amour et de mort, et Poppy qui sous-entend que Le Cheval Pâle est une auberge qui propose de tuer des personnes en échange d’argent [FIN DES SPOILERS]. Dans la série, le final est plus tiré par les cheveux et moins explicite sur le sort de certains personnages mais termine par des rebondissements que l’on ne soupçonnait pas.

  • Un personnage principal dénaturé

Car c’est principalement via le personnage de Mark que le grand écart s’opère dans les versions littéraires et télévisuelles. En effet, simple historien sans vague, il se retrouve mêlé malgré lui à une affaire de meurtres et par acquis de conscience, va chercher à les résoudre. Or, dans la mini-série, le personnage est directement concerné puisque son nom est inscrit sur la liste de victimes. Ce dernier est dépeint à la fois comme charismatique, lâche et infidèle. On pourrait même ajouter : un pécheur du point de vue religieux, hanté par le décès de son épouse (Georgina Campbell) que l’on peut prendre en pitié. A contrario, la version papier de Mark nous inspire davantage de stabilité et de sympathie, et nous avons envie de le suivre dans son enquête. Nous aimons le duo qu’il forme avec Ginger et n’apprenons que très tard qu’il a été marié dans le passé, alors que la mini-série s’appuie sur cet élément. Ainsi, le protagoniste principal est ainsi complètement dénaturé, les deux versions étant à l’opposé l’une de l’autre, de vice à vertu.

  • Conclusion

Le roman en lui-même est assez déstabilisant à lire, Agatha Christie s’éloignant de son univers habituel, au point où nous n’aurions pas pu deviner le nom de l’auteur tant le genre est surprenant par son ambiance sombre et ésotérique. Néanmoins, comme une piqûre de rappel, la romancière insère une référence intrinsèque à l’une de ses œuvres mettant en scène Tommy et Tuppence Beresford, Mon petit doigt m’a dit, lors de l’allusion à l’enfant mort dans la cheminée, et fait brièvement apparaître Ariadne Oliver, la romancière que l’on retrouve dans plusieurs de ses livres. La mini-série reprend quant à elle parfaitement l’atmosphère lugubre du livre mais s’en éloigne grandement pour ce qui est des caractéristiques des personnages ou du fond de l’intrigue. Bien que les dénouements diffèrent, l’un respirant l’espoir et l’autre choisissant le châtiment, les deux œuvres nous inspirent une pensée commune : au final, ne serait-ce pas une simple réflexion sur notre capacité, et surtout notre volonté, à faire le bien ou le mal ?

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